GILLES DELEUZE ET LA POP PHILOSOPHIE
Gilles Deleuze, je ne le connaissais pas, par le biais de philosophie magasine, j’ai découvert ce personnage, ce philosophe pas comme les autres. C’est pour moi un visionnaire de la société de maintenant, une société sous contrôle. Découvront ce personnage.
Gilles Deleuze naît en 1925 à Paris, dans un milieu bourgeois peu cultivé. Sa découverte de la philosophie au lycée, déterminera son avenir. Il passe l’agrégation et entame sa carrière d’enseignant à Amiens.
Il s’y montre un professeur peu orthodoxe : «Je voudrai arriver à faire un cours comme Dylan organise une chanson, étonnant producteur plutôt qu’auteur. Et que ça commence comme lui, tout d’un coup son masque de clown, avec un art de chaque détail concerté, pourtant improvisé ».
L’inventeur de la pop philosophie, prend au sérieux les mutations de son époque, s’arrange un look bien identifiable, chapeau et ongles d’une longueur surnaturelle, et, devient une star de sa discipline.
Après un passage à Orléans, il devient assistant d’histoire de la philosophie à la Sorbonne. Là encore, pas question de se contenter de l’enseignement traditionnel des classiques. Ainsi fait-il un sort à Spinoza, à Nietzsche, à Bergson, à Kant.
En spectateur bienveillant, il passe mai 68 à travailler sa thèse, «Différences et Répétition ».
Sa rencontre avec le psychanalyste Félix Guattari signe l’époque des essais ambitieux, écrits à quatre mains et du succès : l’Anti- Œdipe (1972), Mille plateaux (1980). Il participe à l’expérience de l’université de Vincennes en 1970 et y côtoie Foucault, Badiou, Rancière, Balibar dans des amphis pleins à craquer.
Il consacre son dernier ouvrage et travaux au cinéma (Image-Mouvement en 1983 et Image du temps en 1985).
Mais il est affaibli par une maladie respiratoire, il ne supporte plus d’être enchainé à une bouteille d’oxygène, il se défenestre le 4 novembre 1995.
Un extrait d’un de ces écrits :
POST-SCRITUM SUR LES SOCIETES DE CONTROLES
Gilles Deleuze
1. Historique
Foucault a situé les sociétés disciplinaires aux XVIIIème et XIXème siècles; elles atteignent leur apogée au début du XXème. Elles procèdent à l'organisation des grands milieux d'enfermement. L'individu ne cesse de passer d'un milieu clos à un autre, chacun ayant ses lois: d'abord la famille, puis l'école (« tu n'es plus dans ta famille»), puis la caserne (« tu n'es plus à l'école»), puis l'usine, de temps en temps l'hôpital, éventuellement la prison qui est le milieu d'enfermement par excellence. C'est la prison qui sert de modèle analogique: l'héroïne d'Europe 51 peut s'écrier quand elle voit des ouvriers « j'ai cru voir des condamnés... ». Foucault a très bien analysé le projet idéal des milieux d'enfermement, particulièrement visible dans l'usine: concentrer; répartir dans l'espace; ordonner dans le temps; composer dans l'espace-temps une force productive dont l'effet doit être supérieur à la somme des forces élémentaires. Mais ce que Foucault savait aussi, c'était la brièveté de ce modèle: il succédait à des sociétés de souveraineté, dont le but et les fonctions étaient tout autres (prélever plutôt qu'organiser la production, décider de la mort plutôt que gérer la vie); la transition s'était faite progressivement, et Napoléon semblait opérer la grande conversion d'une société à l'autre. Mais les disciplines à leur tour connaîtraient une crise, au profit de nouvelles forces qui se mettraient lentement en place, et qui se précipiteraient après la Deuxième Guerre mondiale: les sociétés disciplinaires, c'était déjà ce que nous n'étions plus, ce que nous cessions d'être.