
Les prémices : Insurrections paysannes de mars 1793

En mars 1793, des jeunes gens refusent le tirage au sort dans le cadre de la levée de 300 000 hommes, des révoltes éclatent en Mayenne, dans le Léon, le Morbihan, l'Ille-et-Vilaine, la Loire-Inférieure, la Vendée et le Maine-et-Loire. Entre les 11 et le 20 mars, les deux tiers de l'Ouest sont touchés5. L'Ouest est agité par de multiples jacqueries, au cours desquelles la paysannerie exprime de manière brutale sa colère à l'encontre des exigences de l'administration, des prêtres constitutionnels — considérés comme des intrus — la lourdeur des nouveaux impôts, la monnaie papier des assignats et la levée d'hommes, décrétée par la Convention nationale le 24 février 1793. Réprimées par la troupe, ces jacqueries forment une pré-chouannerie5.
Il ne s'agit alors que d'une jacquerie. Des bandes de paysans s'attaquent aux patriotes de leurs paroisses, qu'elles désarment et volent, puis envahissent le chef-lieu du district pour délivrer les hypothétiques prisonniers et détruire les listes servant au tirage au sort. Parfois, la fête tourne au massacre, comme à Machecoul ou à La Roche-Bernard5.
Les premiers mouvements de protestation à la conscription militaire éclatent dès le 3 mars, mais la première révolte eut lieu le 11 mars en Loire-Inférieure à Machecoul, qui est prise par 6 000 paysans qui mettent en fuite la centaine de gardes nationaux présents sur place et tuent une vingtaine de patriotes, ainsi que le prêtre constitutionnel. La révolte s'étend: le 12 mars, 5 000 paysans s'emparent de Savenay, ceux-ci tuent ou blessent plusieurs gendarmes et mettent en fuite la Garde nationale. Des patriotes sont molestés, le prêtre constitutionnel, un administrateur et deux douaniers sont lynchés12. Le même jour en Anjou, 600 paysans mettent en fuite 150 gendarmes et gardes nationaux après leur avoir tué quatre hommes. Le lendemain, 300 à 400 hommes menés par Jacques Cathelineau s'emparent de Jallais

Les protestataires des paroisses aux abords de Nantes, sur la rive droite de la Loire, se retrouvent aux portes de la ville, sous le commandement de Gaudin-Berillais, un noble, « qui n'ose pas attaquer la ville et se borne à lui envoyer une proclamation où il énumère en quinze points les revendications des paysans en vue d'une négociation » ; sont réclamés : la fin des levées d'hommes, le départ des seuls volontaires, la nécessité du consentement des paroisses aux impôts, la fin des perquisitions et réquisitions, la liberté du culte, la liberté de pensée et d'écrire. Aucune réponse ne venant, Gaudin-Berillais est destitué et la plupart des attroupés rentrent chez eux, le restant, qui veut marcher sur la ville, étant dispersé par les Nantais. « L'épisode est révélateur du sentiment profond d'une paysannerie qui refuse une solidarité nationale qu'elle ne comprend pas et revendique au contraire le droit de la moduler selon ses intérêts immédiats »
Dans le Morbihan, le 14 mars, 4 000 paysans pénètrent dans Vannes, mais sont repoussés à coup de fusil par les soldats. Le même jour, à Pluméliau, plusieurs milliers de paysans attaquent deux commissaires escortés par une centaine de gardes nationaux accompagnés de deux canons. Les deux commissaires sont tués, ainsi que trois gendarmes et 25 gardes nationaux. Le lendemain, les insurgés attaquent Pontivy. Les patriotes barricadés dans la ville reçoivent en renfort 50 soldats de Guémené-sur-Scorff et 35 gardes nationaux de Josselin, puis au cours du combat 50 gardes nationaux de Loudéac. Les paysans, découragés, abandonnent le combat et se retirent15. Le 15 mars, 5 000 paysans venus des environs de La Roche-Bernard, Pontchâteau, et Guérande se rassemblent devant La Roche-Bernard.