Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

REFLEXION ET PARTAGE

REFLEXION ET PARTAGE

Des écrits sur mes reflexions du moment: histoire, philosophie, théologie, mes escapades, mais aussi des textes sur la nouvelle langue française


Saint Jean-Jaurès

Publié par ALLIANCE ROYALE DU DAUPHINE sur 31 Août 2017, 17:50pm

Catégories : #NOUVELLE LANGUE FRANCAISE

Saint Jean Jaurès naquit bourgeois à barbe, haut-de-forme, redingote et lavallière. De cette classe, il avait tout à profusion : la montre, l’argent, la morgue, la suffisance, la rhétorique ampoulée, la cupidité, la vocation à exercer le pouvoir, un appétit féroce. Il apprit le grec et le latin, il fut bon élève, il intégra l’Ecole Normale Supérieure de Paris, il fut agrégé au corps des professeurs de lycée, avant d’être nommé dans une faculté de province. Il a même professé un cours de psychologie au lycée de jeunes filles de Toulouse : il fut cette année-là la comtesse de Ségur, née Rostopchine. Rien ne le destinait donc à porter les bannières dans les processions syndicales et pacifistes : ni les idées, ni la carrière, ni l’origine sociale, ni l’expérience. S’il avait été chinois, il aurait été naturellement mandarin.

Les lumières du siècle lui furent révélées lors de banquets où les positivistes célébraient les noces de la raison raisonnante et de l’Etat étatisant. Il soutint une thèse dont le titre annonçait de grands bouleversements dans l’ordre de la pensée : les « fondements du socialisme chez Luther ». La thèse était rédigée et soutenue en latin, Jean Jaurès marchait sur les pas de Saint Thomas d’Aquin. En 1895, dans un article de La Dépêche de Toulouse, il se lamenta que les pogroms fomentés en Algérie par des colons français contre de malheureux Juifs n’eussent pas été plus « sérieux » et plus « politiques » : « Pourquoi n’y a-t-il pas eu en Algérie un mouvement anti-juif sérieux tant que les Juifs appliquaient, surtout au peuple arabe, leurs procédés d’extorsion et d’expropriation ? ». La lumière ne perçait pas encore les vapeurs d’obscurantisme qui embrumaient son cerveau bourgeois.

Un événement lui valut le titre envié de bienheureux : ce fut une grève de mineurs dans un bled proche de chez lui. Juché sur un tonneau, il enchaîna de longues phrases, bien pompeuses. Les mots sortaient de sa bouche en cascades sibyllines, comme le Nil des cataractes ou comme la lave de l’Etna. Les braves bougres qui l’écoutaient furent submergés. Ils n’avaient jamais vu la mer ; ce jour-là, ils entendirent le fracas des tempêtes. Jean Jaurès était doté de l’éloquence ampoulée et rocailleuse des prophètes : « Le courage, c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques » ; « je n'ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n’est qu’un mot », « on n’enseigne pas ce que l’on sait ou ce que l’on croit savoir : on n’enseigne et on ne peut enseigner que ce que l’on est » - slogan que les fondateurs des IUFM ont entendu.

Elu, Jean Jaurès se fit le bon apôtre des coopératives ouvrières ou autres, seule alternative au Mal. Pourtant, jusqu’à sa mort, son esprit resta offusqué par le soleil noir de la bourgeoisie. Quand le capitaine Dreyfus fut condamné aux travaux forcés, il approuva la sentence, qu’il jugea même trop clémente : il eût préféré l’exécution. S’il avait été sous-officier, Dreyfus aurait été condamné à mort ! En 1904, il fonda L’Humanité qui, comme chaque le sait de science sûre, prit la défense des opprimés et des humiliés de l’empire colonial soviétique et de ses satellites. Bien entendu, comme les hommes, où qu’ils vivent, sont hostiles à la guerre, il se prononça pour la paix, c’est-à-dire pour que de malheureux peuples continuent à souffrir sous la schlague du Reich allemand, de l’Empire austro-hongrois et de l’Empire ottoman, formant ainsi ses futurs disciples à la collaboration, ce qu’ils firent de 1940 à 1944.

Pourtant, le miracle finit par se produire. Il eut lieu à la veille de la guerre – dont on ne savait pas encore qu’elle serait une guerre mondiale ni qu’elle serait la première des guerres mondiales du XXe siècle. Jaurès fut déclaré « martyr » et santo subito. C’est ainsi qu’il entra sous le nom de saint Jean Jaurès dans le synaxaire de l’Eglise occulto-socialiste. 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents